La question des tarifs est l'éternel sujet épineux de notre métier. Soumis à de forte disparités d'une région à l'autre, voire parfois d'un guide à l'autre dans une même ville, les tarifs sont régulièrement source de conflits entre collègues ou entre associations. Et je ne parle pas des débutants pour qui il est très difficile de déterminer ses propres tarifs. Sans compter les clients qui, dans la plupart des cas (mais pas tout le temps fort heureusement) préfèrerons toujours payer moins...
Quel tarif pour quel statut ?
Le premier point qu'il faut déterminer est le statut du guide. Selon que l'on soit indépendant, que l'on ait recours à une société de portage salarial ou aux services d'une association ou que l'on soit salarié le tarif n'est pas le même.
Les indépendants et les auto-entrepreneurs facturent leurs prestations. Ils doivent donc être en mesure de le faire (i.e. disposer d'un n° SIRET) et à la condition de ne pas dépasser un certain chiffre d'affaires, il ne sont pas assujettis à la TVA. Leurs tarifs sont donc "nets de taxes". Dans ce cadre, ils ne sont pas salariés et n'ont donc pas les mêmes droits que les salariés du régime général, notamment en termes d'assurance maladie, vieillesse et chômage.
Les guides qui ont recours à une société de portage salarial ou aux services d'une association sont salariés de cette structure et c'est celle-ci qui facture le client et encaisse le montant de la prestation. Les sociétés de portage sont généralement assujetties à la TVA, il y a donc 19,6 % du montant encaissé qui est reversé à l'État. En outre, les sociétés de portage prélèvent une commission. Il faut donc en tenir compte lorsque l'on calcule ses tarifs (pour ne pas trop y perdre et ne pas être trop cher non plus).
Souvent les associations qui regroupent des guides ne sont pas assujetties à la TVA et pratiquent donc des tarifs "nets de taxe". Il faut quand même bien se renseigner auprès du centre des impôts.
Dans ces deux cas, le guide qui démarche son client négocie des tarifs de facturation, TTC ou nets de taxe. Il s'agit là du montant que le client va payer, ce qui a le mérite d'être très clair pour lui.
Lorsque le guide souhaite se faire salarier par le client (agence, tour-opérateur, autocariste...) qui devient donc son employeur, il doit proposer un montant qui correspond au salaire brut. Attention cependant : le salaire brut n'est qu'un indicateur mais ça ne constitue ni ce que le guide perçoit (= salaire net), ni ce que ça coûte réellement à l'employeur. Pour le savoir, le calcul est simple. Le salaire net est égal au salaire brut / 1,21. Et le coût pour l'employeur est égal au salaire brut x 1,4. Attention cependant, ces calculs sont approximatifs.
Au salaire brut, il faut ajouter l'indemnité compensatrice de congés payés (11 %) et la prime de précarité (10 %). Dans certains cas, la prime de précarité n'est pas obligatoire.
Quel tarif pour quelle prestation ?
Les tarifs en usage dans la profession varient d'une région à l'autre. C'est pourquoi il est extrêment difficile de communiquer sur une grille tarifaire homogène. Les clients le savent et certains n'hésitent d'ailleurs pas à faire appel à des guides éloignés mais dont les prix sont inférieurs à ceux pratiqués localement, malgré les frais de déplacement que cela induit.
Il appartient à chaque guide de se renseigner sur les pratiques en vigueur sur son territoire d'exercice. Les sites internet des associations régionales de guides présentent généralement une grille tarifaire indicative.
Exemple concret :
Imaginons une prestation de 4 heures (demi-journée) facturée 170 € H.T. (tarif généralement constaté auprès d'une douzaine d'associations et de guides indépendants)
1) le guide auto-entrepreneur facture la prestation 170 €, sur laquelle il devrait toucher environ 140 € une fois les charges déduites (de l'ordre de 20 %).
2 le guide qui a recours à une société de portage va faire facturer la visite 203,30 € TTC (soit 170 € + TVA) et percevra un salaire net de l'ordre de 93 € (j'ai pris en compte une commission de 8 % pour la société de portage, sachant que cette commission peut être négociable).
3) le guide salarié, quant à lui, doit se baser sur le salaire horaire. Selon les régions et les prestations, celui-ci peut varier de 15 € à 35 € bruts. En partant sur la tranche haute, le guide devrait donc négocier un salaire brut de 140 € (115 € nets), soit un coût de 196 € pour l'employeur (auquel il faudrait ajouter les frais de fonctionnement pour l'émission du contrat de travail et de la fiche de paie, des locaux... coûts difficilement quantifiables mais importants).
Moralité : une même grille tarifaire génère des salaires différents selon le statut du guide. Il est donc d'autant plus difficile de s'y retrouver !
Cette petite démonstration montre que c'est l'auto-entrepreneur qui y gagne en termes de rémunération nette, mais il ne faut pas perdre de vue que ce statut n'est guère avantageux en termes d'assurance maladie, de chômage et de retraite ! Ce que l'on gagne aujourd'hui est donc perdu pour demain...
Le portage salarial paraît moins avantageux mais il ne faut pas perdre de vue que c'est un employeur unique qui gère à votre place les aspects de facturation, relance, émission des fiches de paie, etc. Raison pour laquelle il prélève une commission. Autre avantage : cela évite de jongler avec plusieurs employeurs. Mais le principal inconvénient reste que les prestations sont soumises à la TVA ce qui peut être parfois pénalisant.
Enfin être salarié directement paraît être le meilleur compromis, mais de plus en plus d'agences, autocariste et autres rechignent à salarier des guides à la mission en raison du travail conséquent que cela engendre pour eux (contrats, fiches de paie, déclarations sociales...). Et surtout, recourir à un auto-entrepreneur leur revient moins cher.
Et l'accompagnement ?
Éternel parent pauvre du métier, l'accompagnement est souvent mal payé. Néanmoins, la convention collective des guides accompagnateurs et accompagnateurs au service des agences de voyages et de tourisme (qui date de 1966 et n'est valable qu'en région parisienne, mais c'est la seule qui existe à ce jour) prévoit, dans un accord du 1er septembre 2009, les tarifs suivants :
- 74 € (brut) minimum par jour pour un accompagnement effectué sur le territoire métropolitain
- majoration de 10 % pour les voyages à l'étranger.
Pour info, un travail est en cours pour intégrer les guides dans la convention collective nationale des agents de voyage.
Source : Tour Hebdo n°1403, 2 avril 2010.
Message modifié le 28 avril 2010.